C’est un ballet incessant de blouses blanches et vertes. Il est 20 heures, à la maternité régionale universitaire de Nancy. Des centaines de faire-part de naissances couvrent les murs attenants à la salle de garde et les photos de nouveau-nés semblent regarder le va-et-vient des sages-femmes, auxiliaires de puériculture et médecins.
Une sage-femme se précipite au bloc opératoire. En l’absence de l’infirmière d’astreinte, elle assiste l’obstétricien lors d’une césarienne. Cette fois-ci, l’intervention doit se faire dans les trente minutes. C’est un « code orange ». L’expression résonne avec l’affichette collée à la porte de la salle de garde : « Sages-femmes. Code noir. » Une couleur pour signifier toute la colère de la profession, appelée à manifester, jeudi 7 octobre.
Parmi les principales revendications : une revalorisation des rémunérations, l’augmentation des effectifs et une prise en considération, enfin, du statut médical des sages-femmes. Au sein de l’établissement nancéien, elles devaient être une quarantaine sur cent à participer à la mobilisation nationale.
Pour l’heure, Claire, Anne et Fabien démarrent leur garde de douze heures en trombe. Une stagiaire et deux auxiliaires de puériculture les accompagnent pour gérer les sept salles d’accouchement. « La nuit, c’est compliqué, on est en sous-effectif comme dans de nombreuses maternités », constate Fabien. Claire renchérit : « Ce n’est pas évident, des relèves comme ça. Des patientes partout et personne aux urgences depuis 18 heures. »
Coordinatrice de la salle de naissances, Valérie George comprend les revendications. Elle rappelle que les effectifs de sages-femmes sont ici, comme dans les autres maternités, « normés » en fonction du nombre d’accouchements à l’année, selon des décrets datant de 1998, bien que « la profession et les pratiques aient énormément évolué. »
« Vraie responsabilité médicale »
Le métier n’attire plus. « Les jeunes ne veulent plus travailler à l’hôpital à cause des nuits, des week-ends et préfèrent le libéral. Pour la première fois cette année, nous n’avons pas réussi à recruter de remplaçantes d’été. » La rémunération n’est plus jugée à la hauteur. « Une jeune sage-femme est payée 1 600 euros net, souligne la coordinatrice, après cinq ans d’études, dont une première année de médecine », et la profession n’est pas reconnue dans le code de la santé publique comme médicale. « Pourtant, devant le tribunal, on a une vraie responsabilité médicale », rappelle Valérie George. Les récentes négociations, l’augmentation de 100 euros promise par le ministre de la santé, Olivier Véran ? « Une aumône. » Pour poursuivre dans le métier aujourd’hui, c’est évident qu’« il faut l’aimer », dit-elle. Pour elle, c’est « viscéral ».
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