« Délégation de tâches », « partage de responsabilités », « décision médicale partagée »… : ces expressions rythment, depuis plusieurs semaines, les débats sur la santé. Ceux attendus à l’Assemblée nationale ont tourné court avec l’activation de l’article 49.3 de la Constitution. Mais les discussions qui vont démarrer dans le cadre des négociations de la convention médicale entre l’Assurance-maladie d’un côté, les syndicats de médecins de ville de l’autre, peuvent difficilement éluder la question : comment mieux faire travailler les professionnels de santé ensemble pour « libérer du temps médical », selon un autre élément de langage convenu ?
Le sujet, technique, a pris un relief politique. Le chef de l’Etat l’a fait sien, mercredi 26 octobre sur France 2, en évoquant la lutte contre les déserts médicaux : « On va donner plus de responsabilités à nos infirmières et infirmiers, à nos kinés, à nos pharmaciens et pharmaciennes, à tous nos paramédicaux, à nos psychologues et autres, pour que beaucoup de tâches qui sont faites par nos médecins puissent aller vers ces derniers », a-t-il défendu. Questionné sur la pénurie d’ophtalmologues, Emmanuel Macron a renchéri : « On doit mieux organiser le temps de travail entre les médecins, en particulier spécialistes, et les paramédicaux ».
L’argumentaire résonne depuis un moment avenue de Ségur. A plusieurs reprises, depuis la rentrée, le ministre de la santé et de la prévention, François Braun, a formulé un avertissement : « Si les professionnels ne s’entendent pas entre eux, le gouvernement prendra ses responsabilités. » Il l’a fait en reprenant, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, quelques amendements en ce sens. Ainsi, de l’expérimentation permettant à des infirmières de certains territoires, pour une durée limitée, d’établir des certificats de décès. Ou de l’ouverture, dans les déserts médicaux, de la « permanence de soins » à des infirmières, sages-femmes et kinés. « Le soir, le week-end, ces professionnels pourront apporter une réponse de premier recours dans la logique de responsabilisation des acteurs locaux que nous défendons », explique-t-on au cabinet Braun.
« Un verrou vient de sauter »
Dans une « maison de santé pluriprofessionnelle », ce mode d’exercice collectif souvent cité en exemple, les médecins vont pouvoir déléguer aux infirmières le suivi des patients chroniques, les renouvellements d’ordonnance… : François Braun l’a salué dans un entretien donné à Libération, le 13 octobre. « Un verrou important vient de sauter », a-t-il ajouté.
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