Après un tremblement de terre, les spécialistes s’inquiètent toujours des répliques à venir, susceptibles de provoquer un tsunami. Dans le cas de l’épidémie, à la suite des confinements successifs qui ont fragilisé la santé mentale des étudiants, psychiatres et psychologues voient surgir chez ces jeunes une nouvelle vague de troubles anxieux et dépressifs, de plus en plus difficile à contenir.
« Sur tout le territoire, on commence à revivre la saturation de demandes de consultations psy qu’on a connue en octobre 2020 », observe Laurent Gerbaud, président de l’Association des directeurs des services de santé universitaire (SSU) et médecin directeur du pôle santé handicap étudiants à l’université Clermont-Auvergne. « On est plein, plein, plein », lâche Christophe Ferveur, psychologue de la Fondation santé des étudiants de France, à Paris. « Les sollicitations sont exceptionnellement élevées pour la période – entre 30 % et 50 % de plus que d’habitude, déplore le professeur d’épidémiologie Christophe Tzourio, directeur de l’espace santé étudiants de l’université de Bordeaux. Et cela ne représente que la toute petite partie émergée de l’iceberg : ceux qui savent que nos services existent et qui ont la capacité de faire ce geste compliqué de demander de l’aide. »
Selon la dernière enquête de l’Observatoire de la vie étudiante publiée en novembre, à laquelle ont participé près de 5 000 étudiants, quatre catégories apparaissent particulièrement fragiles : les personnes en difficulté financière (65 % présentent les signes d’une détresse psychologique), les étrangers (53 %), ceux qui ont 26 ans et plus (53 %) et les femmes (48 %). Ces fragilités, cependant, se traduisent par un faible recours à des structures déterminées (dans 14 % des cas) et/ou à des professionnels de santé (pour 24 % des étudiants). Seulement 4 % de l’ensemble des étudiants sont allés dans les SSU et les bureaux d’aide psychologique universitaire (BAPU) au cours des douze mois qui précèdent l’enquête. Le « chèque psy », mis en place en février, qui donne droit à huit séances chez un psychologue en libéral sans avance de frais, a été utilisé par 2 % des interrogés.
« Un stress massif, collectif »
A l’inverse d’un séisme, la crise sanitaire ne présente pas encore de date de fin, d’où l’impression d’un scénario qui se répète et ne permet jamais d’entamer la reconstruction nécessaire. « Chez les étudiants, il y a un effet cumulatif et un effet retard, analyse le psychiatre Frédéric Atger, responsable du BAPU du 5e arrondissement de Paris. Leurs troubles sont plus sévères, les situations de décrochage aussi. »
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