Tribune. Dans notre société moderne, la gestion des risques environnementaux pour la santé se veut rationnelle et basée sur la science et c’est heureux. Les crises des dernières décennies, de l’amiante au Mediator en passant par les perturbateurs endocriniens comme le Distilbène ou le bisphénol A dans les biberons, ont suffisamment marqué l’opinion pour qu’une démarche anticipatrice de ces risques soit mise en œuvre.
Il est devenu évident qu’une innovation technologique n’est pas un progrès en soi, si elle génère des coûts sanitaires et environnementaux majeurs hors de proportion avec les bénéfices qu’elle est censée apporter. Encore faut-il évaluer les uns et les autres, en fonction des connaissances scientifiques les plus récentes et ceci de façon transparente. C’est la logique du principe de précaution, qui est, rappelons-le, un principe constitutionnel. Dans ce processus, la société civile ne peut pas être un acteur passif car c’est elle qui subit les conséquences de ces choix.
Le dossier de la 5G illustre un retour en arrière. Depuis les années 1990, les technologies de télécommunications mobiles muent tous les dix ans : 2G, 3G, 4G, 5G aujourd’hui et déjà on nous annonce la 6G. Depuis le début du XXe siècle, c’est-à-dire dès l’origine de l’utilisation des fréquences hertziennes, des signaux de risques pour la santé interpellent : des risques liés à des expositions intenses à fortes doses : brûlures, cataractes, mais de manière plus insidieuse, des risques à long terme liés à des expositions à faibles doses sont discutés : cancer, perturbation du métabolisme, de l’activité cérébrale et nerveuse, troubles du sommeil…
La question de la variabilité de la sensibilité selon les individus, le sexe, l’âge, la taille, la condition physiologique et la question de la variabilité des effets selon la dose reçue ou la période d’exposition – à l’instar des perturbateurs endocriniens – font aussi partie du débat scientifique.
Valeurs limites
Malheureusement, la France, en se conformant aux recommandations européennes de 1999, a fait le choix de baser sa réglementation sur des valeurs limites d’exposition ne retenant que les effets d’échauffement des tissus, en s’affranchissant totalement des effets de stimulation nerveuse pourtant aujourd’hui admis, notamment sur l’activité électrique de notre cerveau !
En 2009, l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, ancêtre de l’actuelle Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), recommandait la réduction des expositions, notamment pour les plus jeunes ; en 2011, le Centre international pour la recherche sur le cancer (CIRC) classait ces radiofréquences comme cancérogènes possibles ; en 2016, l’Anses recommandait, dans son rapport « Exposition aux radiofréquences et santé des enfants », de reconsidérer les valeurs limites d’exposition réglementaires et les indicateurs d’exposition, afin d’assurer des marges de sécurité suffisamment grandes pour protéger la santé et la sécurité de la population, tout particulièrement celles des enfants.
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