
Les infections qui se produisent pendant un acte médical peuvent avoir de graves conséquences pour les patients, comme l’amputation d’un membre, ou le décès. Or elles ne sont pas indemnisées de la même façon, selon qu’elles ont été contractées dans un « établissement de santé » (hôpital et clinique privée) – elles sont alors qualifiées de « nosocomiales » – ou dans un cabinet individuel (dentiste, dermatologue, etc.).
Depuis la loi Kouchner du 4 mars 2002, les établissements de santé sont présumés responsables de ces infections. Ils doivent donc indemniser leurs patients, sauf s’ils démontrent que la maladie est liée à une « cause étrangère », ce qui est très rare.
En revanche, les médecins libéraux ne doivent réparation que si leurs patients prouvent qu’ils ont commis une « faute ». Cette « différence de traitement » s’explique, notamment, par la nature des actes pratiqués, et par l’importance moindre des infections chez les médecins de ville, a expliqué le Conseil constitutionnel, le 1er avril 2016 (2016-531).
Qu’en est-il d’une clinique de chirurgie esthétique ? Telle est la question que pose l’affaire suivante : le 25 février 2014, Mme X subit une opération de réduction mammaire, dans un établissement dénommé Clinique du docteur Y. Elle présente une infection, ce qui l’oblige à se faire réopérer et à subir une greffe de peau.
« Une véritable équipe médicale »
Les experts dont elle obtient la désignation concluent que l’infection est bien « associée aux soins » prodigués par le docteur Y, mais qu’elle ne résulte pas d’une « faute » de ce praticien. Son avocat, Me Jérémie Ghez, lui conseille alors de poursuivre M. Y, en sa qualité de chef d’établissement de santé, afin qu’il lui verse une indemnisation provisionnelle de 50 000 euros. M. Y répond qu’une « installation autonome de chirurgie esthétique » n’a pas le statut d’un établissement de santé.
Me Ghez proteste que cette structure, qui « est dotée de quatre chambres et d’un bloc opératoire », qui fonctionne avec « une véritable équipe médicale » (anesthésiste, infirmiers…) et qui pratique des « actes de soins invasifs », ne saurait « relever de la médecine de ville ». Il obtient satisfaction, en première instance, à Marseille (Bouches-du-Rhône), et en appel, à Aix-en-Provence.
La Cour de cassation confirme, le 8 décembre 2021 (19-26.191), qu’« une installation autonome de chirurgie esthétique constitue un service de santé » et qu’elle est « soumise à une responsabilité de plein droit en matière d’infections nosocomiales ». Son responsable doit donc indemniser la patiente, dont la maladie n’est pas liée à « une cause étrangère ».
Il vous reste 11.74% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.