Le secteur des maisons de retraite fait de nouveau l’objet de nombreuses critiques. A la suite de la publication dans Le Monde (daté du 25 janvier) des bonnes feuilles du livre-enquête Les Fossoyeurs (Fayard, 388 p., 22,90 euros), écrit par le journaliste Victor Castanet, les actions de plusieurs groupes ont brutalement chuté en Bourse, mardi 25 janvier, pour le deuxième jour d’affilée.
L’action du groupe de maisons de retraite Orpéa, sévèrement épinglé, perdait plus de 15 % à la Bourse de Paris mardi, après une suspension de vingt-quatre heures de sa cotation.
Le titre perdait 15,01 %, pour s’établir à 58,88 euros vers 13 h 45. Lundi, il avait chuté de plus de 16 % avant que l’entreprise ne demande la suspension de la cotation peu après la mi-journée. La tempête n’a pas épargné Korian (− 14 %), le numéro un européen, ni LNA Santé (− 5,2 %), dans un marché en forte baisse (− 4 %).
Orpéa est accusé, témoignages et documents à l’appui, de privilégier la rentabilité sur le bien-être des résidants : nourritures et produits d’hygiène « rationnés », vieillards parfois abandonnés dans leurs excréments ou laissés sans soins pendant des jours. Ses dirigeants, qui ont refusé de répondre au journaliste, « contestent formellement l’ensemble de ces accusations », les qualifiant de « mensongères, outrageantes et préjudiciables » et ajoutant qu’elles traduisent une « volonté manifeste de nuire ». Ils disent avoir saisi leurs avocats pour donner « toutes les suites, y compris sur le plan judiciaire ».
Le reste à charge est très élevé pour les personnes hébergées – obligées de puiser dans leur patrimoine et de demander l’aide de leurs enfants
Orpéa, également présent dans les cliniques privées, gère 1 156 établissements dans 23 pays d’Europe et d’Amérique latine (Mexique, Colombie, Brésil, Chili, Uruguay). Il prévoyait, en novembre 2021, un chiffre d’affaires de 4,3 milliards d’euros sur l’année 2021 (+ 9 %) dans un secteur qui croît avec le vieillissement de la population… notamment en France, où les pouvoirs publics estiment les besoins à 108 000 places supplémentaires en Ehpad d’ici à 2030.
Faute de mise en place d’un « cinquième risque » de la Sécurité sociale financé par des cotisations obligatoires, promis par plusieurs gouvernements et repoussé par manque de financements, le reste à charge est très élevé pour les personnes hébergées – obligées de puiser dans leur patrimoine et de demander l’aide de leurs enfants. La moitié d’entre elles dépensaient au moins 1 850 euros par mois pour financer leur prise en charge, après le versement des allocations (allocation personnalisée d’autonomie, par exemple) et la contribution des familles, selon une enquête publiée à la fin de 2018 par la direction des études, du ministère des solidarités.
Le reste à charge atteignait même 2 420 euros pour la moitié des personnes âgées en établissement privé à but lucratif comme ceux d’Orpéa (contre 1 800 euros pour les autres établissements).