Tribune. En médecine, il existe un principe simple et inviolable : un traitement peut comporter des risques, mais ses bénéfices attendus doivent être supérieurs aux dommages. Rudolf Virchow (1821-1902), un champion médical prussien du XIXe siècle, estimait que la politique n’était rien d’autre qu’une médecine appliquée à la société. Plus exactement, il disait que « la médecine est une science sociale, et la politique n’est rien d’autre qu’une médecine à plus large échelle ». Les leaders politiques « traitent » leur population en leur proposant des interventions dont les avantages l’emportent sur les inconvénients. Il se trouve que ces interventions reposent souvent sur des données, voire sur la science.
On ne sait pas si les candidats à l’élection présidentielle de 2022 auront recours à la science, mais beaucoup de thèmes de campagne s’y prêteront : la santé, l’environnement, la démographie – et donc l’immigration. Les candidats auront l’opportunité d’élaborer leurs programmes sur une quantité de faits, auxquels ils pourront ensuite ajouter leurs idées.
Pour leurs politiques de santé, il leur sera facile de rappeler des vérités claires, dont certaines sont connues depuis deux siècles. La santé publique est plus puissante que la médecine. Elle coûte moins cher et marche plus souvent. De ce fait, elle est bien plus rentable. Elle n’est pas concurrente des soins, au contraire, car une population en meilleure santé est plus performante économiquement, ce qui permet d’accéder aux traitements les plus sophistiqués, qui sont constamment plus chers.
Taxation et régulation
Quand on parle de santé publique, il faut compter avec les déterminants sociaux. En France comme ailleurs, le capital social prédit la santé. Si l’on tient seulement compte des revenus, il existe 13 ans d’écart d’espérance de vie entre les 5 % des Français les plus pauvres et les 5 % les plus riches. Cela veut dire 1/6e de vie en plus ou en moins, sans parler de ce qu’elle contient. Aucune intervention ni aucun médicament ne pourront jamais atteindre l’effet du capital social sur la santé.
On verra si ces mêmes candidats reconnaîtront que l’amélioration de la santé française ne se jouera que minoritairement dans le système de soins. La bonne ou la mauvaise santé se préparent en dehors de l’hôpital ou du cabinet du médecin. Un Etat qui tient à protéger sa population doit s’en prendre aux industries qui vivent intentionnellement ou non de la production de maladies. La chimie, les transports fossiles, l’alcool, le tabac, certains aliments toxiques et, peut-être, déjà, les médias sociaux ont tous des effets négatifs sur la santé physique et mentale.
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