
Est-ce le moment de déterrer la hache de guerre avec les médecins libéraux ? Alors que la crise à l’hôpital et dans les services d’urgence s’aggrave, le débat monte autour d’une proposition sensible depuis plusieurs semaines dans la communauté médicale, non sans provoquer de fortes crispations. Faut-il rétablir l’obligation de garde des médecins libéraux pour tenir les mois qui viennent ? C’est-à-dire leur participation à la « permanence des soins », le soir, la nuit et le week-end ? Cette obligation a été supprimée, à l’orée des années 2000, après une mobilisation des médecins libéraux.
« Cela ne peut plus être un sujet tabou, la question de l’accès aux soins est bien trop prégnante aujourd’hui », avance Frédéric Valletoux, à la tête de la Fédération hospitalière de France (FHF), qui a toujours défendu ce retour de l’obligation pour ses homologues du monde libéral, et l’a fait de nouveau durant ces derniers mois de campagne présidentielle. « Il faut poser ce sujet territoire par territoire, le pire serait de continuer à faire l’autruche », juge-t-il, regrettant la « vindicte et la caricature » qui dominent dans ce débat.
« La situation nous oblige tous, abonde Rémi Salomon, à la tête de la Conférence des présidents de commissions médicales d’établissement de CHU. L’ensemble des médecins des hôpitaux et en ville doivent être mobilisés pour remplir les listes de garde, l’hôpital seul ne tiendra pas, il ne tient déjà plus, le danger est une vraie rupture de l’accès aux soins cet été. »
Une solution qui n’a « aucun sens »
A ce jour, un peu moins de 40 % des médecins généralistes participent à la permanence des soins ambulatoires, selon les derniers chiffres publiés par le Conseil national de l’ordre des médecins au printemps, soit près de 25 000 médecins volontaires sur 63 231 généralistes susceptibles d’y participer. S’il existe une grande « hétérogénéité » selon les départements, l’absence de médecins de garde pose problème le soir et le week-end dans de nombreux territoires, assure-t-on dans les rangs des urgentistes, qui y voient l’une des raisons de la surcharge de leurs services.
Chez les principaux intéressés, le tir de barrage a été néanmoins immédiat. Dans un communiqué acerbe signé par les six organisations syndicales représentatives le 19 mai, les médecins libéraux étrillent les « mensonges et les dérapages » du président de la FHF. « Les maux dont souffre l’hôpital public n’ont qu’une explication : les médecins libéraux qui n’en feraient pas assez », ironisent-ils. « Le temps moyen de travail des médecins libéraux dépasse allègrement les cinquante heures par semaine » et « près de 9 consultations sur 10 sont assurées par un médecin libéral », se défendent-ils, appelant plutôt à une « refonte en profondeur du système de santé ».
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