La facture énergétique n’explose pas seulement au visage des ménages et des entreprises, elle s’invite aussi en plein cœur de la crise sanitaire. Le coût de l’énergie s’annonce déjà stratosphérique dans le budget des structures de soins, ajoutant une ligne de plus dans la très longue litanie des difficultés auxquelles les soignants et leurs directions doivent faire face. Les prévisions budgétaires pour 2023 ne peuvent qu’alerter sur l’urgence du problème : une multiplication parfois par sept pour la facture de gaz est prévue, et, pour l’électricité, le prix du mégawattheure a déjà bondi de 85 euros à plus de 1 000 euros. Au total, une augmentation globale de la facture énergétique de l’ordre de 100 % n’a absolument plus rien d’inenvisageable. Traduit en euros, il faut donc s’attendre à une augmentation à au moins sept chiffres pour une structure de taille moyenne.
La vétusté de notre parc immobilier hospitalier alourdira encore plus la facture, de nombreuses structures étant des passoires thermiques. Un établissement de soins est pourtant un monstre de consommation d’énergie : il ne s’agit pas uniquement de chauffer les chambres des patients, les salles de soin, les blocs opératoires, ou de préparer les repas, mais aussi de faire marcher les scanners, les IRM, de stocker les données des patients dans des salles qu’il faut maintenir à température.
Si on ajoute les appareils de radiothérapie, les congélateurs à – 80 °C, les ventilateurs et l’aération de certains espaces, on comprend vite que le problème ne se réglera pas seulement par une campagne antigaspillage pour sensibiliser les usagers et les soignants à l’importance d’éteindre la lumière et l’ordinateur en sortant.
L’augmentation de la facture énergétique pose tout simplement la question de savoir comment continuer à faire fonctionner nos établissements sans dégrader la qualité des soins, voire des interrogations plus cruciales encore pour certaines structures déjà en difficulté financière. Des questions existentielles d’équilibre financier vont immanquablement faire suite à cette problématique énergétique.
Tarification à l’activité
Dans le monde de l’entreprise, une telle hausse des coûts de production se traduit inévitablement par une augmentation du prix de vente. Cette équation est strictement impossible dans le modèle économique de la santé, car les tarifs des actes ne sont pas libres. C’est le principe de la désormais célèbre T2A (tarification à l’activité), qui est basée sur un remboursement spécifique pour chaque acte, fixé annuellement par l’Etat. Le tarif de chaque acte s’entend comme étant « environné », c’est-à-dire qu’il inclut tous les à-côtés nécessaires pour le réaliser, y compris le salaire du soignant et le coût de l’énergie. L’ensemble des dépenses de santé est contenu dans une enveloppe elle-même fermée, l’Objectif national des dépenses d’assurance-maladie (245,9 milliards d’euros en 2023, soit une augmentation de 3,7 % par rapport à 2022).
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