
Depuis deux mois, il a repris l’entraînement, et rêve désormais de participer au prochain Mondial de football au Qatar, en 2022. Lors du dernier Euro, en juin 2021, le Danois Christian Eriksen s’était pourtant effondré en plein match ; son cœur avait cessé de battre pendant plusieurs minutes. Désormais équipé d’un défibrillateur implantable, le joueur de 30 ans doit littéralement la vie aux bons réflexes de ses coéquipiers et à l’équipe médicale qui a pratiqué immédiatement un massage cardiaque, puis une défibrillation.
Dans le monde du football, le décès dramatique du joueur d’origine camerounaise Marc-Vivien Foé, en 2003, fauché lui aussi en plein match, mais pris en charge trop tardivement, a fait l’effet d’un électrochoc. Les fédérations se sont alors fortement mobilisées pour mieux prévenir les morts subites du sportif, et mettre en place un protocole d’urgence en cas d’arrêt cardiaque sur le terrain. L’été dernier, les neuf personnes qui ont secouru Eriksen, dont le capitaine de l’équipe danoise, se sont vu décerner un prix par l’UEFA, et ont été qualifiées de « véritables héros de l’Euro ».
Anonymes le plus souvent, ces témoins qui initient les premiers gestes qui sauvent sur un terrain de sport sont en tout cas de plus en plus nombreux. En Ile-de-France, le taux de survie des sportifs victimes de ce type d’arrêt cardiaque a triplé en moins de quinze ans, passant de 23,8 % en 2005 à 66,7 % en 2018, révèle une étude publiée le 25 janvier dans le Journal of the American College of Cardiology par des chercheurs du Centre d’expertise mort subite à Paris. En médecine, une amélioration aussi spectaculaire est exceptionnelle. Encore plus s’agissant d’un traitement administrable par tout citoyen : une « apposition des mains » (le massage cardiaque), puis l’utilisation, si possible, d’un défibrillateur automatique externe (DAE).
« Le plus important, c’est le massage cardiaque : à lui seul, il permet de sauver une vie sur deux. Le défibrillateur, c’est la cerise sur le gâteau. » Le professeur Eloi Marijon, cardiologue
Nicole Karam, première autrice de l’étude, et ses collègues ont pris en compte, par périodes successives de deux ans, tous les arrêts cardiaques survenant en pratique sportive dans la région Ile-de-France, entre 2005 et 2018. Au total, 377 ont été recensés, concernant pour l’essentiel des hommes d’âge moyen, dans un cadre d’activité sportive de loisirs. Les jeunes athlètes en compétition représentaient seulement 5,3 % des cas. Si le nombre de ces accidents est resté stable au fil des années, les tentatives de réanimation initiale par un témoin – quand il y en avait un, ce qui était le cas plus de 9 fois sur 10 – ont fait un pas de géant. Le taux de massage cardiaque a bondi de 34,9 % en 2005 à 94,7 % en 2018, celui de l’utilisation d’un DAE de 1,6 % à 28,8 %. Cette démocratisation massive des gestes qui sauvent (et l’équipement des terrains de sport en défibrillateurs) explique que deux tiers de ces morts subites du sportif soient désormais évitées, un chiffre qui pourrait encore être amélioré.
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