Tribune. Une des conséquences de la guerre est la mise en danger vital immédiat de patients nécessitant de façon régulière des soins indispensables. D’après le registre européen des patients ayant une maladie rénale chronique (MRC) nécessitant greffe rénale ou dialyse pour vivre, plus de 10 000 personnes sont traitées en Ukraine, dont environ 1 500 par greffe, un peu moins de 8 000 par hémodialyse, et moins de 1 000 par dialyse péritonéale.
Avant la guerre, l’Ukraine était un des pays d’Europe avec le plus faible nombre de personnes traitées par ces techniques, témoignant de difficultés d’accès aux soins : le nombre de nouveaux patients rapporté à la population était quatre fois moins important en Ukraine qu’en France, avec comme conséquence à peine 10 000 patients traités en Ukraine contre plus de 90 000 en France. La situation des personnes nécessitant une technique de remplacement de la fonction rénale était donc déjà précaire.
Des soins lourds
Ces difficultés deviennent majeures avec la guerre, et ce pour les trois techniques, dont il paraît utile de détailler les modalités. L’hémodialyse est en général réalisée trois fois quatre heures par semaine, essentiellement dans des hôpitaux ou des cliniques, il faut donc que les patients puissent se déplacer, aller et retour, ou qu’ils restent sur place. Il faut de l’électricité sans interruption pour les machines de dialyse, de l’eau propre en très grande quantité (de 500 à 1 000 litres par séance et par patient), des matériels consommables pour réaliser la circulation extracorporelle et l’épuration du sang, et bien sûr du personnel médical et paramédical très qualifié, la règle en France étant d’au moins un infirmier pour quatre patients. En sus de l’hémodialyse, les patients doivent prendre beaucoup de médicaments vitaux, dont certains très coûteux comme l’érythropoïétine qui corrige l’anémie, et ils doivent réaliser des analyses biologiques au moins mensuelles.
La technique de dialyse péritonéale se fait, elle, au domicile par des patients autonomes. Elle suppose des locaux propres et une hygiène parfaite. L’épuration du sang est réalisée en infusant, par un cathéter fixe, du liquide de composition adaptée dans la cavité abdominale, avec plusieurs séquences « infusion, stase, drainage » chaque jour. Ainsi, il faut pour une personne environ 10 kilos de liquides et consommables chaque jour pour assurer une épuration correcte.
Quand la vie dépend de l’hémodialyse ou de la dialyse péritonéale, l’arrêt du traitement est suivi du décès dans un délai de cinq à dix jours en général.
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